Depuis l'approbation des Objectifs dedéveloppement durable (ODD) par l'Assemblée générale des Nations unies en 2015, les gouvernements et les organisations du monde entier mobilisent des ressources considérables pour tenter de transformer les différentes composantes de l'économie afin de respecter leurs engagements dans ce vaste programme.
Dès le début, les obstacles au progrès ont été identifiés, et qui désormais apparaissent clairement, puisque l'impacts immédiats du changement climatique menacent constament les dynamiques et mouvements de transformation à long terme.
Parmi les principaux obstacles, on peut citer :
- la diversité des parties prenantes à impliquer, à encourager et à contrôler afin de traiter chaque problème local dans le cadre global de la durabilité ;
- les défis d'arbitrage dus à l'enchevêtrement des ODD qui peuvent souvent entrer en conflit les uns avec les autres, ce qui nécessite une gouvernance inclusive guidée par des résultats communs attendus ;
- le besoin sans précédent de transformer le paradigme économique encore dominant partout dans le monde, à l'échelle planétaire, avec un véritable devoir de diligence pour l'humanité et la nature.
Dans cette nouvelle course à l'extinction du XXIe siècle, la biodiversité a longtemps été reléguée au second plan, voire au dernier, alors que des problèmes plus urgents surgissaient en cours de route : pandémie mondiale, pénurie énergétique, crise économique et dégâts sociaux inhérents, et tout le contingent des guerres et des tragédies. Pourtant, malgré ses souffrances silentieuses et les temps longs de biocycles invisibles pour l'humain, la biodiversité s'impose comme la clé d'une durabilité réelle de nos modèles de société dits "durables".
les taux d'extinction de la biodiversité atteignent des niveaux critiques
Alors que ce nouveau siècle a révélé l'ère de l'Anthropocène[1], et la capacité de nos sociétés à construire la richesse perçue sur la destruction intensive de l'environnement, le changement climatique commence à engendrer des dégats croissants, impactant les populations des pays développés et détruisant des années de progrès dans les zones émergentes. Dans un réflexe défensif, la communauté internationale et l'opinion publique poussent donc à la réflexion et à une mobilisation toujours plus urgente de moyens d'action pour explorer des modèles de développement moins carbonés, plus éthiques, et respectueux des équilibres écologiques nécessaire à la prospérité de la biodiversité.
Alors que les énergies renouvelables sont en première ligne des négociations sur les émissions de gaz à effet de serre et le marché développé autour de la réduction et de la séquestration du carbone, la biodiversité reste un pilier caché, bien qu'essentiel pour le développement de nos sociétés et de nos économies. La biodiversité et la prospérité écologique sont à la base de toute activité économique, car elles fournissent aux humains les moyens de mener une vie saine et prospère. Dans ce contexte, la COP15 sur la biodiversité, qui s'est ouverte à Kunming en Chine quelques semaines avant la COP26 à Glasgow en Écosse, a conclu des négociations sur un cadre mondial pour la biodiversité post-2020, une série de consultations régionales ayant eu lieu, notamment pour l'Afrique. Comme l'a déclaré la secrétaire exécutive de la Convention sur la diversité biologique (CDB), Elizabeth Maruma Mrema, lors de la cérémonie d'ouverture : "La communauté internationale est confrontée à un "moment de vérité" en matière de protection de la Nature".
Notre inactivité en tant que société met en péril l'ensemble du cycle de vie sur lequel repose le développement humain.
En effet, depuis près de 30 ans, la Convention sur la diversité biologique (CDB) est considérée comme le cadre essentiel du développement durable, alors même que ce traité n'a pas reçu le même traitement médiatique et pédagogique que les Objectifs du Millénaire et leur décendance ODD.
Le traité multilatéral de la CDB sur la biodiversité, qui couvre l'ensemble des écosystèmes, des espèces et des ressources génétiques, a été établi lors du Sommet de la Terre à Rio en 1992, et complété en 2003 et 2010 par des accords complémentaires connus sous le nom de Protocole de Carthagène et de Protocole de Nagoya. La CDB a trois objectifs principaux :
- la conservation de la biodiversité ;
- l'utilisation durable de ses composantes ;
- et le partage juste et équitable des avantages découlant des ressources génétiques.
Malgré sa reconnaissance internationale, ce traité fondamental n'a guère de visibilité dans le débat public, et encore moins dans l'élaboration des politiques en cours.
La biodiversité a longtemps été reléguée au second plan
Depuis la Conférence mondiale sur la biodiversité de Nagoya en 2010, la communauté internationale ne peut que constater un échec global : presque aucun des objectifs n'a été atteint, à l'exception de l'affectation globale de 17% des terres pour les zones de conservation. Comme l'indique la Plate-forme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques [IPBES], qui fait référence au niveau scientifique en la matière, les taux d'extinction de la biodiversité atteignent des niveaux critiques.
Notre inactivité en tant que société, et les œillères que beaucoup de décideurs publiques et privés s'appliquent parfois volontairement, mettent en péril plus qu'un simple Dodo de plus, mais l'ensemble du cycle de vie sur lequel repose le développement humain[2] .
[2] Président de l'IPBES, Sir Robert Watson en 6mai 2019 "La santé des écosystèmes dont nous et toutes les autres espèces dépendons se détériore plus rapidement que jamais. Nous érodons les fondements mêmes de nos économies, de nos moyens de subsistance, de notre sécurité alimentaire, de notre santé et de notre qualité de vie dans le monde entier." https://www.un.org/sustainabledevelopment/blog/2019/05/nature-decline-unprecedented-report/